L’Histoire D’Hecatone

Vous émergez d’un gouffre de ténèbres, vaseux, comme rejeté par un sommeil qui n’aurait jamais dû finir. Vos yeux s’ouvrent, mais la nuit demeure absolue, lourde, presque matérielle, comme si elle s’était infiltrée dans vos poumons. Chaque inspiration vous étouffe davantage.

Vos doigts, en quête d’un ancrage, rencontrent une lampe à huile. Au simple contact, une onde de frissons parcourt votre chair. Ce n’est pas un objet, c’est un souvenir.

Aussitôt, des éclats déchirés envahissent votre esprit : flammes dévorantes, hurlements indistincts, silhouettes noyées dans le chaos. Et partout… la mort.

Un tremblement convulse vos membres. Vous sentez que votre corps, lui, n’a rien oublié. Une mémoire viscérale s’accroche à votre chair, vous transperce de terreur. Plus vous tentez de saisir ces visions, plus vos nerfs se contractent, comme si une force invisible vous interdisait d’approcher.

Une odeur s’insinue alors, rampante et nauséabonde : la fumée, grasse et suffocante. Puis vient le fer. Le goût métallique s’accroche à votre langue, hésitant entre la rouille et le sang, entre la corrosion et l’hécatombe. Peut-être n’y a-t-il pas de différence. Peut-être les deux ne sont-ils qu’une même essence, inséparable.

Vos entrailles se nouent, votre peau se hérisse. Quelque chose en vous crie d’arrêter, de ne pas remuer les ombres du passé. Vous cédez, mais le malaise persiste, comme une présence tapie dans votre dos.

Dans l’obscurité, votre main agrippe un allume-feu délabré. Vous grattez, encore, encore… Jusqu’à ce qu’une étincelle jaillisse. La flamme éclot, fragile, presque honteuse d’exister dans ce lieu. La lampe s’embrase enfin, répandant une lumière jaunâtre qui déchire un pan de la nuit.

Alors vous levez les yeux, devant vous, l’inconnu se déploie, vaste, insondable. Un chemin s’offre à vous. Allez vous le suivre ?

Mais prenez garde, Car dans les ténèbres derrière vous, quelque chose respire encore. Et cela vous attend.